Le quatrième numéro des Cahiers de la Lutte contre les discriminations vient de paraître en ce début juillet 2017. Dirigé par Philippe Liotard, il est consacré aux discriminations dans le sport.
En observant divers espaces et différents sports, les contributions du numéro montrent que les engagements sportifs ordinaires produisent des discriminations elles-mêmes ordinaires, voire des discriminations si discrètes qu’elles échappent à celles et ceux qui les produisent et à celles et ceux qui les subissent. Loin d’être un lieu où l’intégration sociale se ferait spontanément et comme par magie, les sports sont donc aussi des espaces de discriminations en raison de critères liées au sexe, au degré de validité, à l’orientation sexuelle, aux origines ethniques ou au croyances religieuses… comme de nombreux espaces sociaux.
Néanmoins ce numéro fait aussi apparaître que le sport produit des discriminations spécifiques liées au niveau de pratique. De manière provocatrice, on pourrait dire que seuls les meilleurs peuvent jouer, que seules les meilleures restent sur le terrain, condamnant les autres à se transformer en spectateurs. L’ambiguïté des institutions sportives vis-à-vis des discriminations produites par leur organisation-même est mise en évidence, de même que certains usages ordinaires.
Parmi les contributions, Ghislain Onomo et Pierre Chazaud (chercheurs associés au L-VIS) montrent comment une volonté de discrimination à l’égard de joueurs non occidentaux a conduit un club amateur à renouveler sa gouvernance. Ensuite, Nicolas Damont et Olivier Pégard illustrent une discrimination plus ténue, qui tient au paiement ou non de la licence sportive selon le niveau de pratique des joueurs.
Chantal Bournissen, Éline De Gaspari et Clothilde Palazzo montrent que dans les institutions socio-éducatives suisses, le sport contribue à produire des discriminations de genre. Alors même que ces structures utilisent le sport comme moyen de socialisation, la mixité pose problème.
Enfin, une série de contributions porte sur les discriminations identifiables en raison de l’orientation sexuelle. Christelle Meha et Antoine Le Blanc questionnent le rôle des réseaux sociaux dans l’affichage de soi, notamment lors de la participation à des événements sportifs identifiés comme des événements sportifs gays et lesbiens (LGBT). Puis une interview de Manuel Picaud, co-président des Gay Games[1], Paris 2018, présente précisément la fonction de cet événement dans la lutte contre les discriminations homophobes et transphobes. Sur le même type de discriminations, Anthony Mette, André Lecigne et Greg Décamps synthétisent les travaux produits en psychologie sociale en France depuis 2010 sur la question de l’homosexualité et de sa perception dans le sport. Ils interrogent notamment ce qui pourrait être considéré comme « une norme homophobe dans le sport ».
[1] Les Gay Games sont un événement sportif et culturel créé en 1982 et dont la dixième édition se tiendra à Paris en août 2018. À l’instar des Jeux olympiques, ils se tiennent tous les quatre ans.